Anna Novikova, figure clé d’un dossier d’ingérence mêlant activisme et renseignement économique

Par Laurent Arnou

Anna Novikova, militante franco-russe connue pour son engagement en faveur du Donbass, s’était installée depuis plusieurs années dans le paysage associatif prorusse. À travers son organisation SOS Donbass, elle relayait des contenus de soutien aux positions du Kremlin et participait à des initiatives présentées comme humanitaires ou informatives. Jusqu’en 2025, son nom circulait surtout dans la sphère militante, sans véritable dimension judiciaire. Les choses changent lorsque plusieurs événements publics commencent à être analysés dans un contexte d’ingérence étrangère désormais prioritaire pour les autorités françaises.

Le basculement de septembre 2025


Le tournant survient dans la nuit du 3 au 4 septembre 2025, lorsque des affiches prorusses sont collées sur l’Arc de Triomphe. L’action apparaît rapidement organisée : préparation en amont, mise en scène sur place, prises d’images destinées à être diffusées en ligne, puis relais coordonné par plusieurs comptes prorusses suivis à l’étranger. Pour les services spécialisés, cette opération entre dans un schéma déjà observé en Europe, associant symbolique nationale, communication politique et diffusion rapide sur les réseaux. À partir de là, les enquêteurs cherchent à établir qui a participé à l’action, qui l’a relayée et quel réseau gravite autour de ceux qui l’ont revendiquée ou soutenue publiquement.

Un volet économique plus discret mais jugé plus sensible


Au cours des investigations, les autorités découvrent que des individus liés à l’entourage militant d’Anna Novikova ont multiplié les contacts avec des salariés ou cadres d’entreprises françaises considérées comme stratégiques. Ces approches ont eu lieu en ligne, lors d’échanges privés ou lors de rencontres informelles organisées dans un cadre associatif. Les questions posées portaient sur des aspects internes des entreprises : fonctionnement opérationnel, organisation d’équipes, contraintes logistiques ou éléments techniques non publics. Pris isolément, ces échanges paraissent anodins. Mais assemblés, ils permettent d’obtenir une vision plus précise des vulnérabilités ou des dépendances industrielles. Cette méthode, bien connue dans les affaires d’ingérence, constitue un indicateur pris très au sérieux par les juges antiterroristes.

Les mises en examen replacent Novikova au centre du dispositif


Les 20 et 21 novembre 2025, plusieurs personnes sont mises en examen pour ingérence au profit d’une puissance étrangère. Trois d’entre elles sont incarcérées. Le nom d’Anna Novikova apparaît dans ce cadre élargi. Les magistrats l’associent à un réseau soupçonné d’avoir mené simultanément une opération d’influence visible, comme celle de l’Arc de Triomphe et des démarches plus discrètes visant des informations économiques. L’enquête doit désormais déterminer la nature exacte de son rôle, les liens entre les membres du groupe et l’existence éventuelle de directives venues de l’étranger. À ce stade, les éléments restent couverts par le secret de l’enquête et les personnes mises en cause demeurent présumées innocentes.

Un dossier révélateur des méthodes d’ingérence actuelles


L’affaire Novikova montre comment une opération d’ingérence peut combiner plusieurs registres : un front public destiné à influencer l’opinion et occuper l’espace médiatique et un travail souterrain visant des informations utiles à la compréhension du tissu économique français. Cette approche hybride repose sur des profils capables de se déplacer entre militantisme, activités associatives et réseaux personnels. Les autorités y voient l’illustration de pratiques qui se développent depuis plusieurs années en Europe, où les opérations d’influence et de renseignement se chevauchent de plus en plus.

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